Le week-end du 28 Juillet 2007, a eu lieu sur le terrain de Nîmes-Courbessac un "boogie".
Ayant une DNC largage, j'ai cru bon de proposer mes services pour augmenter l'éventail du travail aérien possible sur la base...
Mes papiers sont en règles et le Notam est posé pour la manif.
Au premier saut, le para touche le garde boue, mais je ne m'en aperçois pas ; donc, à l'atterro je roule dessus et l'arrache
(le garde boue, pas le para !...).
Bon, dommage !... me dis-je.
(Le petit détail qui aurait dû attirer mon attention, c'est que le nilstop qui tient la roue s'était dévissé)
Je repars donc, avec un seul garde boue.
Au deuxième saut..., Michel BONHOMME emporte avec lui ... ma roue arrière gauche !...
T'imagines ?...
Si tu as du temps à perdre au cours de ton plus terrible cauchemar, tu visualises ton passager qui saute et prend avec lui la roue arrière de ton pendule !... Je te promets que tu vas te réveiller en transe.
Je n'étais pas très fier.
Deux minutes après, Dédou
(un instructeur avec qui je n'ai jamais volé mais que j'aime bien) me dit à la radio : "- C'est bon Roland, j'ai récupéré ta roue. Je te l'amène en bout de piste sur la 36".
Heu... y rigole ou quoi ?...
J'en ai rien à foutre qu'il ait ma roue, mon souci c'est de poser sans rien casser. Je le remercie néanmoins par politesse et lui dit en ces termes : "- Pour le poser, si tu as une idée, je suis preneur".
En fait, je me voyais me planter au sol... partir en tonneaux et
(au mieux) tout casser.
Il me revint à l'esprit la petite histoire de notre ami qui, suite à une panne moteur, a planté sa roue avant dans de la craie et a fait un looping au sol. Les images qu'il nous a fait voir, passaient en toile de fond derrière mes rétines.
Je regarde mon réservoir : 30 litres. Bon, j'ai le temps de voir venir.
J'ai donc commencé à élaborer toutes sortes de plans plus ou moins foireux, du style :
- On appelle les pompiers et ils m'accrochent avec un hélico... heu faut pas exagérer non plus on n'est pas à la télé !
- Bon, alors je vais à la mer et pose dans l'eau... ouais, mais là, la bécane est foutue et adieu au BMW !
- Alors, peut être que je pourrais aller au Pas de l'Escalette, au dessus de Lodève. Là-bas, il y a une piste de décélération pour les poids lourds qui ont cassé leurs freins. C'est comme une route pleine de gravier sur un mètre de profondeur, en un rien de temps je serais stoppé !... Ouais, comme notre collègue avec la craie...
Bon, hébé je vois pas...
C'est alors que Dédou reprend le micro : "- Roland, tu fais ton approche en 36 comme d'habitude, tu fais ton arrondi comme d'habitude, et quand la roue avant touche le sol tu inclines ton appareil comme pour un virage... heu, c'est quelle roue qui manque, voyons la gauche, donc tu fait un virage à droite et y aura pas de souci".
Putain con, me dis-je, il parle comme un livre, lui.
"- Et quand ça va toucher de l'autre côté, je vais faire une culbute, non ?..." répondis-je au micro.
"- Y'a pas de raison, t'auras plus de vitesse", dit-il, d'un air convaincu.
Bien, hé bé s'il le dit !...
De toutes façons, ses raisonnements tiennent plus la route que toutes mes tergiversations. Adieu la mer, adieu le gravier, adieu la craie... on fait comme d'hab, avec juste un virage en plus !
Je me pointe donc en bout de la 36 avec la barre tirée à fond, car il y a un rabattant que j'ai bien identifié juste avant la piste. J'annonce au micro que je prends la piste qui est fermée, ce qui laissera la piste ouverte au CASA qui fait les largages si je me rétame lamentablement la gueule au sol. J'en profite pour fixer le troisième point de la ceinture de sécurité...
Ensuite, je coupe le moteur histoire de ne pas bouziller l'hélice et avoir moins de chance de prendre feu en cas de tonneaux.
Donc, en bout de piste je suis à peu près à 50 mètres du sol. Je me prends la tabasse comme d'hab. L'appareil s'enfonce, je garde la vitesse max et continue de piquer vers le sol.
Ensuite, je me fais un radada comme pour jouer à un touch and go, le vent vient du Nord, la barre est souple et l'appareil réagit au quart de poil.
Je plane très très bas. La roue arrière droite touche et l'aile supporte encore notre poids, je reste en ligne droite. La roue avant descend, descend encore et enfin touche. Je garde l'axe une fraction de seconde, histoire d'avoir un minimum d'adhérence et commence à incliner l'aile.
L'appareil ripe du coté droit. Le bout de l'aile touche le sol et les appuis commencent à manquer. L'arrière s'enfonce du coté gauche. Une gerbe de poussière se dégage du sol. Un bruit de grattage et... stop tout s'immobilise.
Le vent dégage la poussière...
Je suis vautré sur la barre centrale, la gueule sur la barre de compression et les genoux repliés sous les épaules. Il est des moments où la fierté n'est pas de mise... Ma posture à cet instant devait rappeler celle d'un ouistiti qui se raccroche aux branches après avoir loupé une liane. Je pousse le ptt de la radio et d'une voix calme j'annonce : "- Courbessac de Oscar Oscar, pendulaire posé, pas de problème !"
Ensuite, je débranche le casque. Descend doucement de l'appareil. Regarde mes amis qui arrivent en courant... Je les rassure d'un geste amical et me couche à l'ombre de l'aile.
Une fois de plus l'adrénaline coule dans les veines et les genoux deviennent comme de la guimauve. Le cauchemar est fini, tout va bien.
Dédou, magistral sort un cric de sa voiture, remet la roue en place... utilise une douille de sa boite Facom en guise d'entretoise et me dit d'un air tranquille : "- Bon, ramènes la machine au hangar sinon ils vont croire que tu l'as cassé !"
Je vous dit pas la teuf qu'on a fait avec les paras le soir venu.
Vous trouverez la video du 1° saut, ici :
https://www.youtube.com/watch?v=c9pA_3nq5as Heu, non! là :
https://www.youtube.com/watch?v=qvQ048BlmWQ Je n'ai pas de photos souvenirs de cette petite mésaventure. Toutefois, ceux qui le souhaitent trouveront d'autres photos à cette adresse :
http://pendulaires.free.fr Amitiés
Roland